jeudi 18 juin 2009

Al-Farabi

Al-Farabi naquit en 872 dans une famille de nobles à Wasij, dans le district de Farab, au Turkestan (actuellement au Kazakhstan). Son père, d’origine persane, avait exercé un commandement militaire à la cour turque. Très jeune, il accompagne son père à Bagdad où il étudie la grammaire, la logique, la philosophie, la musique, les mathématiques et les sciences ; il y suit l’enseignement de Abu Bishr Matta b.Yunus, célèbre traducteur et commentateur des philosophes grecs. A Harran, il fut disciple du nestorien Yuhanna b. Haylan. Il appartient donc à l’école philosophique d’Alexandrie qui s’était installée successivement à Harran, Antioche et Merv avant de se fixer à Bagdad. Au cours de ses années d’études, al-Farabi accumule une connaissance telle de la philosophie qu’elle lui vaudra le surnom de « Second Maître », par référence au « Premier Maître », Aristote.

En 943, il s’installe à Alep où il devient membre du cercle littéraire de la cour de Sayf al-Dawla Hamdani qui aimait s'entourer de savants et d'hommes de lettres. Al-Farabi aime à s’isoler dans la nature pour méditer et écrire et c’est sans doute parce qu’il désespère de réformer sa société qu’il verse dans le soufisme. Ses voyages l’amènent en Égypte et c’est à Damas qu’il s’éteint en 950 à l’âge de quatre-vingts ans.

Al-Fârâbi est surtout connu pour ses ouvrages de philosophie et de musique (Kitab al-musiqa al-Kabir, considéré comme le meilleur traité musical du monde arabe). Il reste connu également pour ses commentaires des Éléments d'Euclide et de l'Almageste de Ptolémée. Al-Fârâbi est considéré comme le précurseur de la scolastique. En astronomie, il adopta le système aristotélicien et le simplifia, tandis que, au plan métaphysique, il conçut Dieu comme le « premier un ».

La grande passion d’al-Farabi est de comprendre l’univers, l’être humain et la place que celui-ci y occupe, en vue de parvenir à une représentation globale du monde et de la société. Il étudiera avec soin la philosophie de l’Antiquité, en particulier celle de Platon et d’Aristote, s’imprégnant d’éléments platoniciens et néoplatoniciens, qu’il intègre à la civilisation arabo-islamique dont la principale source est le Coran et les diverses sciences qui en dérivent.

Al-Farabi marque un tournant dans l’histoire de la pensée philosophique islamique : il est le véritable fondateur de la gnoséologie, qui repose sur la raison universelle et les démonstrations qu’elle administre. Le souci d’al-Farabi est de redonner son unité à la pensée islamique en mettant l’accent sur la gnoséologie démonstrative. Il est le fondateur de la logique dans la culture islamique. Il se préoccupe aussi de restaurer l’unité en politique, faisant de la science politique un axe majeur de sa philosophie, en s’inspirant de l’ordre qui régit la nature mais aussi du Coran qui souligne la relation entre gnoséologie et valeurs. Pour lui, la finalité première de la connaissance doit être la connaissance de Dieu et de ses attributs, une connaissance qui marque profondément le comportement moral de l’être humain et aide celui-ci à trouver la voie qui permet d’atteindre la fin ultime de son existence, tout en contribuant, indirectement, à éveiller l’intellect et à le conduire à la sagesse qui, pour al-Farabi, est le stade suprême de l’épanouissement intellectuel auquel l’homme puisse accéder ici-bas. Ainsi, le sujet central de sa philosophie est l’unité de la société et celle de l’Etat, qui se réalisent par l’union de la pensée, de la sagesse et de la religion — elles-mêmes fondements du gouvernement de la communauté, qui doit être à l’image de l’unité et de l’ordre de l’univers.

De fait, al-Farabi compare souvent l’ordre et l’unité de la cité à ceux de l’univers. Philosophie et religion sont donc chez lui deux expressions d’une seule et même vérité et ne diffèrent que dans le mode d’expression : la philosophie explique la religion et la démontre ; elle n’est pas en conflit ni en contradiction avec elle. L’important, sur ce point, est qu’al-Farabi expose ce qui était tabou à l’époque hellénistique, à savoir la catégorie logique qu’est la « démonstration » dont il montre la fonction sociale et éducative dans la formation de l’esprit et de la conscience politique.

Al-Farabi, suppose un Être suprême, Dieu, l’Un sans cause, d’où découle le multiple dont procède la création. L’Un crée le monde par le seul exercice de l’intellect, et de lui procèdent les « causes secondes », qui génèrent à leur tour chacune un intellect. Ce processus se répète de l’Un jusqu’aux différents niveaux de l’Univers et jusqu’aux éléments, et enfin, passant par des formes de plus en plus complexes, jusqu’à l’Homme (De l’intellect).

L’Homme, le seul à être doté d’une « faculté parlante », doit être libéré de la matière de façon à atteindre l’« intellect acquis », stade ultime que vise le sage, et par lequel il reçoit la révélation. Dans le système d’al-Farabi, le sage sera donc aussi prophète, celui qui possède à la fois intelligence et imagination, et qui saura dévoiler aux hommes du commun les vérités intelligibles.

Il est aussi celui qui sera capable de les guider vers le bonheur. Al-Farabi accorde ainsi à la théorie politique beaucoup plus d’attention que tout autre philosophe musulman, adaptant, dans le Livre du gouvernement de la cité, le système platonicien de la République et des Lois : le sage devient chef de la Cité, cité vertueuse qui couronne le système farabien.

Al-Farabi a formulé l’idéal d’une religion universelle, dont toutes les autres religions existantes seraient l’expression symbolique. Il est l’auteur d’une centaine d’ouvrages, qui ont été perdus pour beaucoup d’entre eux, comme ses commentaires d’Aristote, et dont quantité d’autres ont subsisté seulement dans leur traduction en latin médiéval. Outre ses écrits philosophiques, il a compilé un catalogue des sciences, première tentative musulmane de systématisation de la connaissance humaine. Il a aussi contribué à la théorie musicale dans son Grand Livre de la musique.

Il est tenu par ses successeurs, notamment Avicenne, Averroès et Maïmonide, pour le plus grand philosophe de l’islam. Il était connu en Occident, au Moyen Âge, sous les noms d’Avennasar et d’Alfarabius.

Source partielle : UNESCO

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